En tant que nouveaux représentants du personnel dans les trois versants de la fonction publique, élus en décembre 2022, vous avez de nombreux défis à relever. Trouver votre place dans la nouvelle instance, appréhender les modifications de vos missions dans un nouveau fonctionnement et avec moins de moyens. Il nous semble important, après avoir rappelé brièvement les modifications, de vous informer sur vos droits à la formation, que vous devrez utiliser pour affronter les enjeux qui vous attendent, pour être le plus efficace possible auprès de vos collègues.
Article extrait de Décodage n°23 | Janvier 2023
La concrétisation de la loi de transformation de la fonction publique par la fusion des instances de représentation du personnel
Les nouvelles élections professionnelles, dans les trois versants de la fonction publique, viennent concrétiser les modifications de la loi de transformation de la fonction publique du 6 aout 2019 concernant le dialogue social. Suivant ainsi le modèle du secteur privé en application de la réforme adoptée en septembre 2017 par la création des Comités sociaux économiques (CSE), la fusion des instances pour la Fonction publique est désormais mise en place. Les Comités Techniques (CT) et les Comités d’Hygiène, Santé et Conditions de travail (CHSCT) ne sont plus, laissant place aux Comités sociaux d’établissement (CSE) pour la fonction publique hospitalière, aux Comités Sociaux Territoriaux (CST) pour la fonction publique Territoriale et aux Comités Sociaux d’Administration (CSA) pour la fonction publique d’État.
Après la dépossession d’une partie des attributions en matière de gestion des carrières des commissions administratives paritaires (CAP) dont le nombre se voit diminué, c’est désormais le tour des instances du dialogue social. Selon les données de la direction générale de l’administration et de la fonction publique, de la direction générale des collectivités locales et de la direction générale de l’offre de soins, la création d’une nouvelle instance fusionnée doit conduire à la suppression de 2 054 CHSCT de la Fonction publique d’État, 4 800 dans la Territoriale et 2 200 dans l’hospitalière.
Néanmoins ces nouveaux comités sociaux, en plus des prérogatives des anciens comités techniques et des nouvelles attributions concernant les lignes directrices de gestion, se voient attribuer également les sujets relatifs à la protection de la santé physique et mentale, l’hygiène et la sécurité des agents. Pour cela, à l’instar des commissions santé sécurité et conditions de travail (CSSCT) mises en place dans les établissements ou entreprises de plus de 300 salariés dans le secteur privé, une formation spécialisée en matière de santé, sécurité et conditions de travail (F3SCT) devra être mise en place à partir du seuil de 200 agents. Rappelons qu’avant la réforme, la constitution d’un CHSCT était obligatoire à partir du seuil de 50, si ce seuil a été relevé à 200, il sera toutefois possible de mettre en place une formation spécialisée en cas de risques professionnels particuliers.
Bien que cette formation puisse exercer les compétences dans le domaine de la santé, il ne s’agit plus d’une instance indépendante mais bien d’une composante, d’une commission constituée en partie par des élus des comités sociaux[1].
Quelques rappels concernant les attributions de ces nouvelles instances
Les comités sociaux des trois versants de la fonction publique ont en commun les compétences sur les questions collectives, touchant l’ensemble des agents, des services, quels que soient leurs statuts, comme stipulé dans le code général de la fonction publique à l’article L 251-1 [2]. Ils seront amenés à débattre, à donner leurs avis dans le cadre de consultation et devront examiner notamment :
- L’organisation et le fonctionnement des services
- L’accessibilité des services et leur qualité
- Les orientations stratégiques sur les politiques de ressources humaines
- Les lignes directrices de gestion
- Les enjeux et politiques d’égalité professionnelle et de lutte contre les discriminations
- Les questions relatives entre autres à la protection de la santé physique et mentale, l’hygiène, la sécurité et les conditions de travail
Selon les différents versants, des consultations du comité vont varier comme, par exemple, les comités sociaux d’administration (FPE) qui seront consultés sur les projets de statuts particuliers, d’arrêté de restructuration et sur la participation de l’État et des établissements au financement de la protection sociale complémentaire. Les comités sociaux territoriaux (FPT) seront quant à eux, consultés sur les orientations stratégiques en matière d’action sociale et d’aide à la protection complémentaire, et sur les règles relatives au compte épargne temps des agents territoriaux. Les comités sociaux d’établissements (FPH) seront pour leur part consultés sur les orientations stratégiques de l’établissement et sur celles inscrivant l’établissement dans l’offre de soin du territoire.
Lorsqu’une formation spécialisée en matière de santé, sécurité et conditions de travail (F3SCT) pourra être constituée dans un établissement, un territoire ou une administration, elle aura pour missions :
- Informer sur les visites de l’inspecteur santé et sécurité au travail
- Réaliser les visites de services
- Solliciter des expertises en cas de risque grave ou de projet important
- Alerter en cas de danger grave et imminent
- Contribuer à l’analyse et la prévention des risques professionnels
Concernant les commissions administratives paritaires (CAP) et les commissions consultatives paritaires (CCP), leurs attributions avaient déjà été modifiées notamment pour la première qui s’est vue impactée directement par la création des lignes directrices de gestion, supprimant ainsi leurs anciennes compétences en matière de mutation et mobilité[3] et d’avancement et de promotion[4].
Les CAP, chargées du suivi individuel de la carrière des agents devront être consultées soit à l’initiative de l‘administration, soit à la demande d’un fonctionnaire sur :
- Les projets de sanctions disciplinaires
- Les décisions défavorables (refus de titularisations, licenciement, refus d’un congé pour formation syndicale ou congés de formation à l’hygiène et à la sécurité, renouvellement ou non d’un contrat d’embauche d’un salarié en situation de handicap)
- Le demande de réintégration d’un fonctionnaire
- Le refus d’une disponibilité
- Le refus d’un temps partiel
- Le refus d’une démission
- La demande de révision du compte rendu de l’entretien professionnel annuel
- Le refus opposé à une demande de télétravail
- Le refus d’un congé du compte épargne temps
Les CCP, qui examinent les situations individuelles des agents contractuels seront saisies obligatoirement ou à la demande de l’agent sur des décisions telles que :
- Des licenciements
- Le non-renouvellement du contrat d’un agent titulaire d’un mandat syndical
- Des sanctions disciplinaires autres que l’avertissement et le blâme
- La demande de révision du compte rendu de l’entretien professionnel annuel
- Le refus opposé à une demande de télétravail ou de temps partiel
- Des refus successifs de formation
Quelles formations pour les nouveaux élus ?
Ces nouvelles instances et les évolutions qui en découlent nécessitent plus que jamais pour les nouveaux élus d’utiliser leurs droits à la formation, de s’en emparer entièrement et rapidement. Dans les décrets concernant chaque versant de la fonction publique[5], deux formations sont évoquées, une première en matière d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail et une seconde (uniquement pour les représentants du personnel de la fonction publique hospitalière) concernant les compétences du comité.
La formation en matière d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail est prévue dans les trois versants et de nombreux éléments sont communs, que nous listons ci-dessous.
Quel contenu ?
Conformément aux articles R2315-9 à R2315-11, la formation des membres de la délégation du personnel a pour objet :
- De développer leur aptitude à déceler et à mesurer les risques professionnels et leur capacité d'analyse
- De les initier aux méthodes et procédés à mettre en œuvre pour prévenir les risques professionnels et améliorer les conditions de travail.
À qui s’adresse-t-elle ?
- Aux titulaires et suppléants
- Sa durée varie de 3 à 5 jours minimum selon différents éléments :
- 5 jours minimum pour les représentants aux comités quand il n’y a pas de F3SCT
- 5 jours minimum pour les membres de la F3SCT quand celle-ci est présente
- 3 jours minimum pour les représentants aux comités quand la F3SCT est présente
- Cette formation est renouvelée de droit à chaque mandat
Quelle prise en charge ?
- Le temps de formation n’est pas imputé sur les heures de délégation et l’agent est rémunéré
- Le coût de la formation est pris en charge par l’employeur selon un plafond défini à savoir maximum 36 fois le SMIC horaire
- Les frais de déplacement et de séjours éventuels sont pris en charge par l’employeur dans les conditions prévues par les réglementations internes de chaque établissement, autorité territoriale ou administration
Quelle procédure ?
- Les agents devront faire une demande écrite au moins 1 mois avant le début de la formation et la réponse devra être obtenue au plus tard 15 jours avant le début de la formation
- Le bénéfice de ce congé ne pourra être refusé que si les nécessités du service s’y opposent
- À son retour de formation, l’agent devra remettre une attestation délivrée par l’organisme de formation constatant son assiduité
- En cas d’absence pour motif valable, l’agent sera tenu de rembourser les dépenses prises en charge
- La demande d’autorisation d’absence comportera les mêmes éléments à savoir :
- La date à laquelle l’agent souhaite prendre son congé
- Le descriptif de la formation
- Le coût de la formation
- Le nom et l’adresse de l’organisme de formation
Qui choisit l’organisme de formation ?
- C’est l’agent qui choisit librement la formation et son organisme
Deux points divergent selon la fonction publique concernant cette formation.
Quand réaliser sa formation ?
- Pour la fonction publique hospitalière et d’état, les formations HSCT, qu’elles soient d’une durée de 3 ou de 5 jours, sont à réaliser en cours de mandat
- Pour la fonction publique territoriale, seule la formation de 3 jours pourra se réaliser en cours de mandat, pour les élus du CST (en l’absence de F3SCT) ou les membres de la F3SCT, qui bénéficient chacun d’une formation de 5 jours, elle devra être réalisée durant le premier semestre du mandat.
Quel organisme de formation choisir ?
- Pour la fonction publique d’état :
- soit un organisme figurant sur la liste arrêtée par le préfet de région conformément à l’article R. 2315-8 du Code du travail[6]
- soit un des organismes figurant sur la liste arrêtée en application de l’article 1er du décret du 15 juin 1984,
- soit l’administration ou l’établissement concerné, ou un organisme public de formation.
- Pour la fonction publique territoriale :
- soit un organisme figurant sur la liste arrêtée par le préfet de région conformément à l’article R. 23158 du Code du travail [7],
- soit un des organismes figurant sur la liste arrêtée en application de l’article 1er du décret du 22 mai 1985,
- soit le Centre national de la fonction publique territoriale.
- Pour la fonction publique hospitalière :
- Soit un organisme figurant sur la liste arrêtée par le préfet de région conformément à l’article R. 23158 du Code du travail
- soit les organismes figurant sur la liste établie en application de l’article 1er du décret du 6 mai 1988
La formation compétence du comité est prévue en revanche uniquement pour les élus du personnel, titulaires et suppléants, des comités sociaux d’établissement dans la fonction publique hospitalière. Si son contenu n’est pas précisé par décret, il concernera de toute évidence la nouvelle instance, son fonctionnement et ses attributions. D’une durée minimum de 5 jours, ses modalités de prise en charge, la rémunération des agents et les dispositions concernant le choix et la prise en charge de la formation et de l’organisme, sont les mêmes que pour la formation HSCT.
Pour les élus des fonctions publiques d’état et territoriale, bien que leurs décrets respectifs ne précisent pas de droit à cette autre formation, rien n’empêche de l’envisager. En effet, les évolutions des instances concernent tout autant ces élus. Les organisations syndicales devront alors s’emparer de ce sujet dans le cadre de futures négociations, afin de pouvoir obtenir le même droit légitime et nécessaire que pour les élus de la fonction publique hospitalière.
Quelques chiffres sur les élections professionnelles en complément…
Pour toutes précisions, vous pouvez nous contacter sur cette boite mail : [email protected]
[1] Les titulaires de la F3SCT seront désignés parmi les membres élus des comités sociaux, alors que les suppléants pourront être désignés librement par les organisations syndicales
[2] "questions collectives de travail ainsi que les conditions de travail dans les administrations, les collectivités et les établissements publics, au sein desquels ils sont institués"
[3] Depuis le 1er janvier 2020
[4] Depuis le 1er janvier 2021
[5] Pour la fonction publique territoriale : article 98 du décret n° 2021-571 du 10 mai 2021 / pour la fonction publique d’état : article 94 du décret n°2020-1427 du 20 novembre 2020 / pour la fonction publique hospitalière : art 75 du Décret n° 2021-1570 du 3 décembre 2021
[6] 3E Études et Formations possède l’agrément et figure sur la liste arrêtée par le préfet
[7] 3E Études et Formations possède l’agrément et figure sur la liste arrêtée par le préfet