La "directive européenne sur la transparence des rémunérations" : une pression mise sur les employeurs ?

Les instances européennes entendent solutionner le problème des écarts salariaux toujours trop importants entre les femmes et les hommes. Dans leur viseur, l’absence d’informations données par les employeurs sur les rémunérations en vigueur dans leur entreprise. Que va changer la "directive sur la transparence des rémunérations" ?

Article extrait de Décodage n°28 | Septembre 2023


 

 

Comment une travailleuse pourrait-elle savoir qu’elle est victime de discrimination en raison d’une différence de rémunération alors même qu’elle ne connaît pas les niveaux[1] moyens appliqués ? La "directive sur la transparence des rémunérations"[2] entend imposer un cadre contraignant pour les employeurs tentés par l’opacité.

Les obligations d’information

Au nom de l’égalité femmes-hommes, la directive du 10 mai 2023 met l’accent sur l’information relative aux rémunérations des travailleurs "des secteurs public et privé" (article 2).

Avant toute chose, la directive fait montre de pédagogie. Elle livre un certain nombre de définitions, dont celle de rémunération. La directive définit cette dernière comme le salaire de base et "tout autre avantage", "payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par un employeur à un travailleur en raison de l’emploi de ce dernier" (article 3).

En ce qui concerne les rémunérations, la comparaison entre les situations devra absolument s’opérer sur la base de compétences objectives : compétences, efforts, responsabilités, conditions de travail et "tout autre facteur pertinent pour l'emploi ou le poste concerné". Autrement dit, la référence au sexe de l’individu ne saurait être un critère pertinent pour classifier les emplois (article 4).

L’obligation d’information à l’égard du salarié à l’embauche

Dans toutes les entreprises, l’employeur devra effectivement informer le candidat à l’embauche du niveau de rémunération initiale et des critères d’évolution de cette dernière. C’est pourquoi les dispositions de la convention collective applicable en lien avec la rémunération et le poste proposé seront communiquées au candidat.

En aucune façon, l’historique des rémunérations perçues par le candidat ne pourra être un élément demandé et utilisé par l’employeur.

Pour garantir l’égalité des rémunérations, il sera interdit à l’employeur de proposer des offres d’emploi, des dénominations de postes et des processus de recrutement qui révèlent des discriminations fondées sur le sexe.

L’information à destination du candidat à l’embauche pourra prendre tout type de forme, mais elle sera parfaitement accessible, notamment pour les personnes en situation de handicap (article 5).

Cette disposition doit permettre un droit de négociation du salaire plus juste, car reposant sur des éléments avérés.

L’obligation d’information à l’égard des salariés de l’entreprise

Dans les entreprises de plus de 50 salariés, l’employeur sera également débiteur d’une obligation d’information, à l’égard de tous les salariés, concernant les niveaux moyens de rémunération pratiqués dans la structure. Mais cette information portera également sur les critères de détermination et les modalités de progression de cette rémunération. Là encore, aucune référence au sexe du travailleur ne saurait orienter ces éléments.

Les règles d’accessibilité de l’information prévues pour le candidat à l’embauche s’appliqueront ici (article 6).

Dans toutes les entreprises, l’employeur informera par écrit les salariés, qui en font la demande, de leur niveau de rémunération individuel et des niveaux moyens applicables aux salariés effectuant le même travail (ou un travail d’égale valeur). L’employeur devra surtout indiquer la répartition de ces niveaux en fonction du sexe.

Les représentants du personnel ou les organismes pour l’égalité de traitement auront la possibilité de faire cette demande pour le compte des salariés intéressés.

Si les informations reçues "sont inexactes ou incomplètes", les salariés pourront demander et recevoir, directement ou par le biais de leurs représentants, des compléments d’information. L’employeur disposera d’un délai maximum de 2 mois pour les fournir.

Le droit à cette information sera porté à la connaissance des salariés tous les ans.

Le texte interdit par ailleurs les clauses de secret salarial insérées dans les contrats de travail. Les salariés doivent en effet pouvoir être libres de communiquer leur rémunération, si cela est nécessaire pour "l’application du principe de l’égalité des rémunérations".

A contrario, l’employeur pourra leur imposer l’obligation de ne pas divulguer les informations qui ne concernent pas leur situation, si cela n’est pas nécessaire pour l’application du principe d’égalité des rémunérations (article 7).

L’information individualisée devra, elle aussi, respecter les règles d’accessibilité évoquées plus haut (article 8).


L’obligation de communication

L’établissement d’un rapport

L’employeur devra constituer un rapport annuel (si l’entreprise comporte plus de 250 salariés) ou triennal (si l’entreprise comporte plus de 100 salariés).

Ce rapport portera spécifiquement sur les écarts de rémunération existants au sein de la structure.

La directive donne les critères nécessaires pour établir ce rapport :

  • Écart de rémunération entre les femmes et les hommes ;
  • Écart de rémunération entre les femmes et les hommes au niveau des composantes variables ou complémentaires ;
  • Écart de rémunération médian entre les femmes et les hommes ;
  • Écart de rémunération médian entre les femmes et les hommes pour les composantes variables ou complémentaires ;
  • Proportion de travailleurs féminins et masculins bénéficiant de composantes variables ou complémentaires ;
  • Proportion de travailleurs féminins et masculins dans chaque quartile ;
  • Écart de rémunération entre les femmes et les hommes par catégorie de travailleurs, ventilé par salaire ou traitement ordinaire de base et par composantes variables ou complémentaires.

Pour les entreprises de plus de 250 salariés, le premier rapport annuel pourra être établi dans un délai maximum de 4 ans suivant l’entrée en vigueur de la directive.

Ce même délai s'applique pour les entreprises comptant entre 150 et 249 salariés, qui doivent établir leur premier rapport triennal.

Pour les entreprises comptant entre 100 et 149 salariés, le premier rapport triennal pourra être établi dans un délai maximum de 8 ans suivant l’entrée en vigueur de la directive.

Pour les entreprises de moins de 100 salariés, chaque État membre pourra décider d’imposer ou non la rédaction de ce rapport (article 9).

Des modalités de communication du rapport ont été élaborées par la directive, mais elles appellent une véritable explicitation au moment de la transposition de cette dernière.

Les représentants des travailleurs auront accès aux méthodes utilisées par l’employeur pour établir le rapport.

Remarque 3E : Cette transparence est une bonne nouvelle, mais en quoi consistera réellement ce droit à l’information ? Sera-t-il accompagné de prérogatives supplémentaires en termes de contrôle ?

 

Après consultation des représentants des travailleurs sur les informations données par le rapport, la direction devra confirmer l’exactitude de celles-ci.

Remarque 3E : Ici également, des questions se posent : cette consultation des représentants des travailleurs prendra-t-elle la forme d’un avis ? Quelle portée celui-ci aura-t-il ?

 

Pour juger des apports de la directive, il faut que ses effets soient vérifiables.

Ainsi, tout l’enjeu de la transposition de la directive sera d’éclairer sur le véritable rôle qu’aura le CSE dans cette nouvelle étape vers la fin des écarts salariaux.

Des règles spécifiques de communication sont prévues en ce qui concerne le critère de "l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes par catégories de travailleurs, ventilé par salaire ou traitement ordinaire de base et par composantes variables ou complémentaires".

En effet, l’employeur fournira les résultats sur cet écart à tous les travailleurs, ainsi qu’à leurs représentants. Sur demande, l’inspection du travail et l’organisme pour l’égalité de traitement obtiendront également ces résultats.

Les résultats des autres critères constituant le rapport seront publiés sur le site internet de l’entreprise ou mis à disposition du public par tout autre moyen.

Ils seront également, et directement, communiqués à l’organisme chargé du suivi de l’application de la directive.

En effet, chaque État membre désignera un organisme chargé du soutien de la mise en œuvre des mesures nationales visant à faire appliquer les dispositions de la directive. L’organisme de suivi pourra faire partie d’un organisme ou d’une structure existants au niveau national.

Concrètement, l’organisme de suivi sera chargé de :

  • La sensibilisation des entreprises et organisations publiques et privées, des partenaires sociaux et du public à la question de la promotion du principe de l’égalité des rémunérations et du droit à la transparence des rémunérations, y compris en luttant contre la discrimination intersectionnelle en matière d’égalité des rémunérations pour un même travail ou un travail de même valeur ;
  • L’analyse des causes de l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes et la mise au point des outils destinés à aider à évaluer les inégalités en matière de rémunération, en s’appuyant, en particulier, sur les travaux et les outils d’analyse de l’EIGE ;
  • La collecte des données reçues des employeurs (…) d’une manière facilement accessible et conviviale, permettant une comparaison entre les employeurs, les secteurs et les régions de l’État membre concerné, et l’assurance que les données des quatre années précédentes sont accessibles, si elles sont disponibles ;
  • La collecte des rapports d’évaluation conjointe des rémunérations ;
  • L’agrégation des données sur le nombre et les types de plaintes pour discrimination en matière de rémunération introduites devant les autorités compétentes, y compris les organismes pour l’égalité de traitement, et de recours portés devant les juridictions nationales (article 29).

De lui-même, l’employeur peut inscrire les résultats de ces autres critères sur la base de données administratives, telles que celles fournies par les employeurs aux autorités fiscales ou de sécurité sociale.

Remarque 3E : Il sera nécessaire que la transposition de la directive fasse apparaître des précisions sur la nature des bases de données concernées, ainsi que sur les modalités d’une telle compilation d’informations.

Les suites à donner au rapport : l’hypothèse de l’évaluation conjointe

Si le rapport fait apparaître un écart de plus de 5 % entre les rémunérations des femmes et des hommes, employeur et représentants des salariés devront engager une évaluation conjointe.

L’engagement de cette évaluation repose sur deux autres conditions cumulatives qui s’ajoutent à la première :

  • L’employeur n’aura pas justifié cette différence de niveau de rémunération moyen par des critères objectifs non sexistes ;
  • L’employeur n’aura pas remédié à cette différence injustifiée de niveau de rémunération moyen dans un délai de six mois à compter de la date de communication des données sur les rémunérations.

S’il n’y a pas de représentants des salariés, la directive offre la possibilité à ces derniers d’en désigner, dans cette seule optique de rédaction de l’évaluation conjointe.

L’évaluation conjointe relèvera les différences de rémunération à l’aide d’indicateurs précis :

  • Analyse de la proportion de travailleurs féminins et de travailleurs masculins au sein de chaque catégorie de travailleurs ;
  • Informations sur les niveaux de rémunération moyens des travailleurs féminins et des travailleurs masculins et sur les composantes variables ou complémentaires pour chaque catégorie de travailleurs ;
  • Toutes les différences de niveaux de rémunération moyens entre les travailleurs féminins et les travailleurs masculins pour chaque catégorie de travailleurs ;
  • Raisons de ces différences de niveaux de rémunération moyens fondées sur des critères objectifs non sexistes, pour autant qu’il en existe, telles qu’elles ont été déterminées conjointement par les représentants des travailleurs et l’employeur ;
  • Proportion de travailleurs féminins et de travailleurs masculins qui ont bénéficié d’une augmentation de leur rémunération à la suite de leur retour d’un congé de maternité ou de paternité, d’un congé parental ou d’un congé d’aidant, si une telle augmentation est intervenue dans la catégorie de travailleurs concernée au cours de la période pendant laquelle le congé a été pris ;
  • Mesures visant à remédier aux différences de rémunération si celles-ci ne sont pas justifiées par des critères objectifs non sexistes ;
  • Évaluation de l’efficacité des mesures résultant de précédentes évaluations conjointes des rémunérations.

L’évaluation conjointe sera portée à la connaissance des salariés et de leurs représentants, ainsi qu’à celle de l’organisme de suivi de l’application de la directive. Sur demande, inspection du travail et organisme pour l’égalité de traitement pourront également y avoir accès.

L’évaluation conjointe proposera des solutions pour atténuer les différences de rémunération, notamment en fonction des critères non discriminatoires déjà existants et du profil des postes au sein de la structure.

L’employeur sera tenu par cet objectif de gommage des différences. Il devra le remplir dans un délai raisonnable et avec le concours des représentants du personnel. L’inspection du travail et l’organisme pour l’égalité de traitement pourront également l’y aider (article 10).


Des moyens concrets pour assurer le respect de ces obligations ?

Le droit européen est donc fortement mobilisé actuellement pour que le principe d’égalité des rémunérations soit effectivement respecté.

La directive sur la transparence des rémunérations a été promulguée au Journal officiel de l’Union européenne le 17 mai dernier.

Son entrée en vigueur est effective depuis le 6 juin. Elle consacre un processus rapide démontrant l’engagement de tous les acteurs, ou presque, pour l’égalité femmes-hommes. Le 4 mars 2021, la Commission européenne a publié une proposition de directive. Un consensus entre le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne a été trouvé le 15 décembre 2022. La directive a été adoptée par le Parlement le 30 mars 2023. Ce fut le tour du Conseil le 24 avril.

Preuve de ce volontarisme, la directive du 10 mai 2023 intègre la notion de discrimination "intersectionnelle". Cela vise le cas de figure d’une discrimination fondée sur le sexe, par exemple, étroitement liée à d’autres formes de discrimination dans une même situation.

En d’autres termes, le droit européen souhaite élargir la notion de discrimination pour tenter de mettre fin à des situations complexes. En effet, il est plus difficile de caractériser une rupture d’égalité lorsque plusieurs motifs de discrimination s’entremêlent.

Pour autant, s’agissant des moyens concrets, des questionnements subsistent sur l’apport réel de la directive.

Celle-ci indique que les entreprises de moins de 250 salariés devront bénéficier d’une aide technique et de formation fournies par les États membres. Employeurs et représentants des travailleurs, au sein de ces entreprises, sont donc censés recevoir un soutien effectif afin qu’ils puissent respecter les obligations posées par la directive (article 11).

Les travailleurs victimes d’une rupture d’égalité de rémunérations devront pouvoir accéder à des procédures judiciaires destinées à faire respecter les obligations inhérentes à ce principe d’égalité. L’accès au juge doit être facilité. Cela veut dire que la fin de la relation de travail, au cours de laquelle la discrimination est censée s’être produite, ne doit pas empêcher les travailleurs concernés de faire valoir leurs droits a posteriori. Le respect des obligations nées du principe d’égalité des rémunérations doit être effectif, à tout moment (article 14).

Remarque 3E : Là encore, la transposition de la directive en droit interne sera cruciale pour définir des pratiques tangibles en matière d’aides aux entreprises et d’accès au juge. En effet, les formulations demeurent trop vagues pour véritablement cerner le degré d’accompagnement prévu par cette directive.

 

Si l’employeur contrevient aux dispositions renforçant le principe d’égalité des rémunérations, un régime particulier est prévu en ce qui concerne la charge de la preuve. Celle-ci subit un "renversement" : l’employeur devra prouver l’absence de discrimination en termes de rémunération, dès lors que surviennent des faits laissant supposer l’existence d’une telle discrimination (article 18).

Remarque 3E : En droit interne, la tendance au déplacement de la charge de la preuve est apparue dernièrement dans la jurisprudence, notamment en ce qui concerne la discrimination syndicale[3]. S’agit-il alors d’une véritable consécration générale de cette tendance par le droit européen ?

 

Le cas échéant, les États membres devront établir des sanctions "effectives, proportionnées et dissuasives" (article 23).

Les sanctions doivent viser une indemnisation efficace et entière de tout travailleur ayant subi un dommage du fait d’une violation des droits ou obligations inhérents à ce principe d’égalité. Concrètement, l’indemnisation consistera en un octroi des sommes dues, en une réparation du préjudice subi et en un paiement des intérêts de retard (article 16).

Toute structure ayant un intérêt légitime à défendre l’égalité des femmes et des hommes devra pouvoir être en mesure d’engager une procédure judiciaire ou administrative pour appuyer l’action des salariés victimes de discrimination. Cependant, l’accord de ces derniers sera nécessaire (article 15).


Quelles conséquentes concrètes en France ?

La France devra transposer cette directive le 7 juin 2026 au plus tard (article 34).

En tout état de cause, elle doit contribuer à resserrer l’étau autour des employeurs. Pourtant, ceux-ci sont déjà tenus, en théorie, au respect du principe d’égalité des rémunérations[4].

Pourquoi alors la directive serait-elle un levier d’action et une plus-value par rapport à l’existant ?

En effet, les avancées nationales dans le domaine ne sont pas négligeables, notamment depuis les vingt dernières années.

La loi du 9 mai 2001 relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, dite "Génisson", a initié un mouvement pour mettre fin aux inégalités qui concernent les conditions d’accès à l’emploi, à la formation, à la promotion et aux conditions de travail de manière générale.

Cette loi a établi l’obligation de négocier sur l’égalité professionnelle au niveau des branches, ainsi que celle, pour les entreprises, de rédiger un rapport de situation comparé et chiffré entre les femmes et les hommes sur ce sujet.

Depuis la loi du 23 mars 2006 relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, les salariées de retour de congé maternité ont droit aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles, perçues ou décidées pendant leur congé, par des salariés relevant de la même catégorie professionnelle. Le cas échéant, cela équivaut à la moyenne des augmentations individuelles dans l’entreprise.

L’objectif de la loi du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance et à l'égalité professionnelle, dite "Copé-Zimmermann", était clair. Un quota minimal de 40 % de femmes devait être respecté, à terme, au sein de ces instances.

La loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes prévoit plusieurs mesures phares. À titre d’exemple, elle encadre le dépôt obligatoire de l’accord ou du plan d’action relatif à l’égalité professionnelle à l’administration du travail pour les entreprises de plus de 50 salariés. Aussi, elle préconise un renforcement des sanctions prud’homales en matière de licenciements discriminatoires ou liés à des faits de harcèlement sexuel.

La loi du 17 août 2015 relative au dialogue social, dite "Rebsamen", instaure le principe de la liste paritaire et alternante dans le cadre des élections professionnelles.

La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel institue "l’index d’égalité femmes-hommes". Sous peine de mesures correctives en deçà d’un certain résultat, les entreprises de plus de 50 salariés doivent élaborer et publier une évaluation interne, traduite par une note sur 100, sur les écarts de rémunération.

La loi du 24 décembre 2021 visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle, dite "Rixain", entend notamment imposer un quota de 40 % de femmes cadres dirigeantes d’ici 2030.

La directive pourra renforcer cet arsenal de dispositions internes, à condition qu’elle contraigne réellement les employeurs à respecter leurs obligations.

Dans son esprit, la directive entend obliger les entreprises à prendre les devants dans la lutte contre les écarts de salaires. Les obligations d’information et de communication, ainsi que le déplacement de la charge de la preuve sont les deux mesures phares d’un texte qui souhaite donner un rôle actif aux employeurs.

Aussi, les dispositions de la directive pourraient être à même de donner un poids certain aux négociateurs en ce qui concerne les salaires. En effet, la mise en lumière des écarts de rémunération rend irréfutables les manquements de l’employeur.

L’obligation de communication, à travers le rapport sur les écarts de rémunération, témoigne d’une volonté de favoriser le dialogue social. Néanmoins, pour cela, les élus pourraient bénéficier d’un réel droit de regard sur les méthodes employées pour élaborer le rapport. De la même manière, ils pourraient tirer profit de la consultation prévue sur les résultats du rapport. En l’absence de précisions, le doute reste permis jusqu’à la transposition de la directive.

Cet exemple est généralisable à toute la directive : le texte bénéficiera-t-il, à l’échelle de la France, des moyens à la hauteur de ses ambitions ?

 


[1] Il convient de rappeler que le niveau de rémunération est constitué de la rémunération annuelle brute et de la rémunération horaire brute qui y est attachée.

[2] Directive (UE) 2023/970 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 visant à renforcer l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre les femmes et les hommes pour un même travail ou un travail de même valeur par la transparence des rémunérations et les mécanismes d’application du droit.

[3] Cass.Soc., 28/06/2023, n°22-11.699 : "Lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement ne caractérisent pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient à l'employeur de démontrer que la rupture du contrat de travail ne constitue pas une mesure de rétorsion à la demande antérieure du salarié d'organiser des élections professionnelles au sein de l'entreprise".

[4] L’article L.3221-2 du Code du travail énonce : "Tout employeur assure, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes".

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