Les entretiens de début et de fin de mandat sont parfois méconnus des représentants du personnel. Or, ils sont nécessaires pour vous permettre d'aborder et de conduire votre mandat sereinement. En début de mandat, l'entretien est un moment d'échanges avec l'employeur qui peut prévenir une éventuelle surcharge de travail qui résulterait d'une mauvaise articulation entre votre mandat et votre activité professionnelle. En fin de mandat, l'entretien vous permet de valoriser les compétences acquises lors de votre mandat.
Article extrait de Décodage n°35 | Mai 2024
L'entretien de début de mandat est prévu à l'article L. 2141-5 alinéa 3 du Code du travail : "Au début de son mandat, le représentant du personnel titulaire, le délégué syndical ou le titulaire d'un mandat syndical bénéficie, à sa demande, d'un entretien individuel avec son employeur portant sur les modalités pratiques d'exercice de son mandat au sein de l'entreprise au regard de son emploi. Il peut se faire accompagner par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise. Cet entretien ne se substitue pas à l'entretien professionnel mentionné à l'article L. 6315-1." |
L'entretien de fin de mandat est prévu à l'article L. 2141-5 alinéa 4 du Code du travail : "Lorsque l'entretien professionnel est réalisé au terme d'un mandat de représentant du personnel titulaire ou d'un mandat syndical, celui-ci permet de procéder au recensement des compétences acquises au cours du mandat et de préciser les modalités de valorisation de l'expérience acquise. Pour les entreprises dont l'effectif est inférieur à 2 000 salariés, ce recensement est réservé au titulaire de mandat disposant d'heures de délégation sur l'année représentant au moins 30 % de la durée de travail fixée dans son contrat de travail ou, à défaut, de la durée applicable dans l'établissement." |
Qui est concerné par ces entretiens ?
Entretien de début de mandat
L'entretien de début de mandat concerne :
- les représentants du personnel titulaires : élus du CSE, membres du comité de groupe, membres du comité d'entreprise européen, représentants de proximité ;
- les délégués syndicaux ;
- les titulaires d'un mandat syndical : représentants syndicaux au CSE, représentants de section syndicale.
L'entretien de début de mandat est facultatif car pour pouvoir bénéficier d'un entretien individuel avec leur employeur, ces représentants du personnel doivent en faire la demande.
Ils peuvent, à ce titre, se faire accompagner par une personne de leur choix appartenant au personnel de l'entreprise.
Entretien de fin de mandat
L'entretien de fin de mandat concerne :
- les représentants du personnel titulaires : élus du CSE, membres du comité de groupe, membres du comité d'entreprise européen, représentants de proximité ;
- les représentants du personnel disposant d'un mandat syndical : les délégués syndicaux, les représentants syndicaux au CSE, les représentants de section syndicale.
En outre, il faut opérer une distinction selon l'effectif de l'entreprise :
- Dans les entreprises dont l'effectif est supérieur à 2 000 salariés (pour les mandats prenant effet après le 31 décembre 2019), l'entretien de fin de mandat concerne : tous les représentants du personnel titulaires et tous les représentants du personnel disposant d'un mandat syndical.
- Dans les entreprises dont l'effectif est inférieur à 2 000 salariés (et pour toutes les entreprises pour les mandats ayant pris effet avant le 31 décembre 2019), l'entretien de fin de mandat concerne : les représentants du personnel titulaires et les représentants du personnel disposant d'un mandat syndical, dont les heures de délégation représentent au moins 30 % de la durée de travail fixée dans leur contrat de travail ou, à défaut, de la durée applicable dans leur établissement.
(Ex : Pour un représentant du personnel travaillant à temps complet sur une base de 151.67 heures mensuelles, ses heures de délégation doivent représenter 45 heures mensuelles)
Quand ces entretiens se déroulent-ils ?
Entretien de début de mandat
Cet entretien est organisé au début du mandat du représentant du personnel qui en fait la demande, peu important qu'il n'en soit pas à son premier mandat. Le Code du travail ne précise pas de délai quant à sa tenue. Néanmoins, compte tenu de l'objet de cet entretien (voir ci-après), le représentant du personnel nouvellement élu ou désigné ne doit pas tarder pour solliciter l'employeur.
Dès lors que l'employeur reçoit la demande du représentant du personnel, il a l'obligation de lui faire bénéficier de cet entretien individuel. Toute mesure contraire de la part de l'employeur est considérée comme abusive et donne lieu à dommages et intérêts (article L. 2141-8 du Code du travail).
Entretien de fin de mandat
L'entretien de fin de mandat s'effectue pendant l'entretien professionnel du représentant du personnel (élu titulaire ou disposant d'un mandat syndical), dès lors que la fin de son mandat coïncide avec la date de son entretien professionnel.
Les salariés bénéficient tous les 2 ans d'un entretien professionnel avec leur employeur consacré à leurs perspectives d'évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d'emploi (art. L. 6315-1 I. du Code du travail). Cet entretien ne porte pas sur l'évaluation du travail du salarié. L'entretien professionnel doit également comporter des informations relatives à la validation des acquis de l'expérience, à l'activation par le salarié de son compte personnel de formation, aux abondements de ce compte que l'employeur est susceptible de financer et au conseil en évolution professionnelle. Par ailleurs, tous les 6 ans cet entretien professionnel fait un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié (art. L. 6315-1 II. du Code du travail). |
Quid si la fin du mandat ne coïncide pas avec la date de l'entretien professionnel ? À ce sujet le Code du travail ne répond pas à la question.
À notre sens, l'employeur a tout intérêt et même l'obligation de programmer dans un délai raisonnable l'entretien professionnel portant l'entretien de fin de mandat à l'échéance de celui-ci.
En effet, l'entretien de fin de mandat n'est pas autonome de l'entretien professionnel et l'employeur doit avoir l'initiative de sa tenue. Toute mesure contraire prise par l'employeur est considérée comme abusive et donne lieu à dommages et intérêts (article L. 2141-8 du Code du travail).
Par conséquent, les élus peuvent légitimement, sur la base des articles L. 2141-5 al. 4 et L. 2141-8 du Code du travail, demander l'organisation de leur entretien de fin de mandat (porté par l'entretien professionnel) sous un délai maximum d'environ 3 à 4 mois après la fin de leur mandat. Le fait que l'entretien professionnel devait se tenir dans un délai plus tardif n'importe pas. L'employeur ne pourra pas refuser une telle demande.
La tenue de cet entretien de fin de mandat et, corrélativement d'entretien professionnel, fera repartir le compteur de ce dernier à zéro et impliquera donc que le prochain se tienne bien dans les 2 ans à compter de celui-ci.
Quel est l'objet de ces entretiens ?
Entretien de début de mandat
Lors de l'entretien de début de mandat, le représentant du personnel échange avec son employeur sur les modalités pratiques d'exercice de son mandat au sein de l'entreprise au regard de son emploi.
À ce titre, l'entretien de début de mandat vise à faire le point sur :
- l'articulation entre l'exercice du mandat et l'activité professionnelle du représentant du personnel, en abordant notamment le sujet de la charge de travail (aménagement du poste, remplacement sur le temps accaparé par le mandat, report de certaines missions, etc.) ;
- la gestion des moments d'absence inhérents au mandat (réunions, heures de délégation, temps de déplacement, etc.), qui ne doit pas être un prétexte de l'employeur pour s'ingérer dans l'exercice du mandat du représentant du personnel.
Par ailleurs, cet entretien ne se substitue pas à l'entretien professionnel. Cela signifie que d'une part, l'entretien de début de mandat est autonome de l'entretien professionnel, d'autre part, l'entretien de début de mandat n'aborde pas les mêmes sujets que l'entretien professionnel (qui porte sur les perspectives d'évolution du salarié).
Entretien de fin de mandat
L'entretien de fin de mandat est un dispositif de valorisation de carrière des salariés titulaires de mandats.
En pratique, au moyen de cet entretien, l'employeur et le représentant du personnel peuvent envisager les modalités de réintégration à son poste de travail ou à un nouveau poste de travail selon les compétences acquises durant le mandat.
L'entretien de fin de mandat a deux objets :
- Recenser les compétences acquises par le représentant du personnel au cours de son mandat (ex : capacité de représentation, de prise de parole, de décision, d'expérience en matière de ressources humaines, etc.).
- Préciser les modalités de valorisation de l'expérience acquise (qui pourra être certifiée). En pratique, cela implique de procéder au cours de l'entretien à une comparaison entre les nouvelles compétences acquises par le représentant du personnel et celles figurant sur la liste des compétences, des représentants du personnel élus et titulaires d'un mandat syndical, permettant d'obtenir une certification.
En quoi consiste la certification des compétences des représentants du personnel élus et titulaires d'un mandat syndical ?Ce dispositif est prévu à l'article L. 6112-4 du Code du travail. Un certain nombre de compétences acquises pendant l'exercice d'un mandat de représentant du personnel ou d'un mandat syndical permettent d'obtenir une certification professionnelle et/ou un titre professionnel. La liste de ces compétences est établie au sein d'un arrêté. La certification peut permettre à ses bénéficiaires d'acquérir une nouvelle qualification et d'évoluer professionnellement. Dans un premier temps, il faut obtenir un certificat de compétence professionnelle (CCP). Cette certification est structurée en 6 domaines de compétences transférables, en correspondance avec l'exercice d'un mandat de représentant du personnel ou d'un mandat syndical :
Dans un second temps, il est possible d'obtenir un titre professionnel car chacun de ces CCP présente au moins une équivalence avec un bloc de compétences d'un titre professionnel délivré par le Ministère du Travail.
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ÉQUIVALENCES
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CERTIFICATION |
TITRE PROFESSIONNEL (TP) |
CCP Encadrement et animation d’équipe |
CCP Animer une équipe TP : Responsable de petite et moyenne structure (niveau III) |
CCP Gestion et traitement de l’information |
CCP Gérer le traitement, l'organisation et le partage de l'information TP : Assistant de direction (niveau III) |
CCP Assistance dans la prise en charge de projet |
CCP Assister un dirigeant dans la prise en charge d'un projet TP : Assistant de direction (niveau III) |
CCP Mise en œuvre d’un service de médiation sociale |
CCP Assurer un service de médiation sociale TP : Médiateur social accès aux droits et services (niveau IV) |
CCP Prospection et négociation commerciale |
CCP Prospecter, présenter et négocier une solution technique TP : Négociateur technico-commercial (niveau III) |
CCP Suivi de dossier social d’entreprise |
CCP Assurer la tenue et le suivi du dossier social de l'entreprise TP : Gestionnaire de paie (niveau III) |
Source : Guide de la certification des compétences des représentants du personnel et des mandataires syndicaux, Ministère du Travail, 2019 |
Cet entretien permet également de vérifier si le mécanisme de progression de rémunération a été mis en œuvre (art. L. 2141-5-1 du Code du travail).
Ce mécanisme s'applique en l'absence d'accord collectif de branche ou d'entreprise déterminant des garanties d'évolution de la rémunération au moins aussi favorables, pour les représentants du personnel et les représentants syndicaux.
Il concerne les représentants du personnel et titulaires d'un mandat syndical qui disposent d'heures de délégation sur l'année dépassant 30 % de la durée de travail fixée dans leur contrat de travail ou, à défaut, de la durée applicable dans l'établissement.
Ils bénéficient alors d'une évolution de rémunération, au moins égale, sur l'ensemble de la durée de leur mandat, aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant cette période par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle et dont l'ancienneté est comparable. À défaut de tels salariés, cette évolution de rémunération doit être au moins égale aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues dans l'entreprise.
L'évolution de rémunération s'entend au sens de l'article L. 3221-3 du Code du travail, c'est-à-dire du salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum et tous les autres avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au salarié en raison de l'emploi de ce dernier.
Selon la Cour de cassation, en l'absence d'accord collectif de branche ou d'entreprise déterminant des garanties d'évolution de la rémunération des salariés mentionnés à l'article L. 2141-5-1 du Code du travail au moins aussi favorables, la comparaison de l'évolution de leur rémunération doit être effectuée annuellement (Cass. soc., 20 déc. 2023, n° 22-11.676).
Concernant le panel de comparaison, la Cour de cassation précise que la comparaison doit être faite avec les salariés qui relèvent du même coefficient dans la classification applicable à l'entreprise pour le même type d'emploi, engagés à une date voisine ou dans la même période (Cass. soc., 20 déc. 2023, n° 22-11.676).
Il est à noter qu'un accord collectif peut prévoir des modalités plus favorables pour l'entretien de début de mandat et l'entretien de fin de mandat :
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