Fonction Publique : le statut de lanceur d’alerte

Ces deux dernières années, une loi et une circulaire sont venues préciser et améliorer le statut de lanceur d’alerte pour les agents publics. Celui-ci répond toutefois à des règles bien précises qu’il ne faut pas négliger.

 

Article extrait de Décodage n°38 | Janvier 2025


 

Comment le statut de lanceur d’alerte est-il régi dans la fonction publique ?

La loi du 21 mars 2022[1] a amélioré la protection du lanceur d’alerte et a assoupli la procédure de signalement des alertes, tandis que la circulaire du 26 juin 2024[2] est venue préciser le cadre légal pour les agents publics.

Si le statut de lanceur d’alerte dans la fonction publique est tout aussi protecteur que dans le privé, il est beaucoup plus complexe à obtenir.

Les employeurs sont dans l’obligation de mettre en place une procédure interne, et il faudra bien souvent passer par celle-ci (sauf dans de rares circonstances) avant d’utiliser des procédures externes, voire de faire une divulgation dans les médias.


Quelles sont les conditions à remplir ?

Pour être qualifié de lanceur d’alerte et bénéficier des mesures de protection, il faut remplir plusieurs conditions : être une personne physique, être de bonne foi, et ne pas agir dans l’intention d’obtenir une contrepartie financière.

La circulaire du 26 juin a étendu l’extension de la protection du lanceur d’alerte aux tiers qui lui sont liés ou qui l’ont aidé. Un syndicat pourrait donc aussi prétendre à cette protection.

Pour bénéficier de ce statut protecteur, l’alerte doit concerner des informations, des faits qui se sont produits ou qui vont se produire. Par exemple : crime, délit, préjudice pour l’intérêt général, etc.


Quelle est la marche à suivre ?

Dans chaque fonction publique, les employeurs sont libres d’organiser ce dispositif comme ils le souhaitent, il faut donc se référer au texte voté dans les comités sociaux[3].

Une procédure complexe

Nous l’avons vu, l’agent doit non seulement répondre à la définition donnée, mais aussi respecter la procédure prévue pour lancer une alerte :

  • Un signalement en interne est obligatoire en premier lieu dès lors que l’auteur du signalement estime qu’il est possible de remédier à l’alerte efficacement sans risque de représailles. C’est le référent déontologue et/ou alerte qui est généralement désigné pour recueillir et traiter les signalements.

 

Dans le cas où des représailles sont pressenties par le lanceur d’alerte, ou en cas de danger imminent ou manifeste pour l’intérêt général, il peut se passer d’un signalement en interne mais il doit apporter les preuves du risque encouru.

 

  • Un signalement externe peut être fait soit directement, soit en parallèle ou après un signalement interne. L’agent peut saisir plusieurs autorités externes. En plus du soutien que pourront apporter les membres de l’instance représentative du personnel au sein de sa structure, un syndicat peut être sollicité, tout comme le Défenseur des droits[4] qui peut vous orienter au mieux.

  • Pour finir, il est possible d’effectuer une divulgation publique. Pour qu’elle soit valable, l’agent devra impérativement respecter la procédure : signalement interne et/ou signalement externe avec une absence de réponse appropriée dans les 6 mois.

 

Attention :

La loi de transformation du 6 août 2019 impose aux employeurs publics de mettre en place un dispositif de recueillement des signalements d’agents qui s'estiment victimes d'atteintes volontaires à leur intégrité physique, d'un acte de violence, de discrimination, de harcèlement moral ou sexuel, d'agissements sexistes, de menaces ou de tout autre acte d'intimidation.

Pour dénoncer ces faits, l’agent sera obligé dans un premier temps de solliciter cette plateforme de signalement, avant d’utiliser toute autre procédure.

 

Le dispositif de signalement peut être mis en place de plusieurs manières : soit en interne, soit par convention entre plusieurs administrations, établissements publics, collectivités territoriales, et notamment en le confiant aux centres de gestion.

Les représentants du personnel présents en Formation Spécialisée en Santé, Sécurité et Conditions de Travail [F3SCT] doivent donc connaître son fonctionnement pour accompagner au mieux les agents dans cette procédure.

L’article 5 du décret instaurant ce dispositif, oblige l’employeur à informer ses agents sur la démarche à suivre, il faut donc veiller à lui rappeler ses obligations, pour qu’elle soit connue de tous.

 

Il en est de même pour les agents travaillant dans des établissements sociaux ou médico-sociaux voulant dénoncer des mauvais traitements ou des privations. Un signalement doit déjà être adressé à l’employeur ou toute autre autorité compétente.

Le rôle des comités sociaux

Ce statut est une vraie avancée, qui permet de faire bénéficier d’une réelle protection à l’agent.

Le rôle des représentants du personnel au sein des comités sociaux est essentiel car en connaissant les procédures internes et les évolutions législatives sur le sujet, ils peuvent accompagner au mieux les agents qui lanceraient ce type d’alerte.

Depuis de nombreuses années, la fonction publique ne cessant de se privatiser, les négociations sont désormais une possibilité pour les représentants du personnel. Si cela déroge au statut, cela reste malgré tout une manière d’améliorer le quotidien des agents. Il est donc essentiel pour les représentants du personnel de s’informer, de se former pour obtenir en négociations l’amélioration des conditions de travail des agents, des augmentations de salaire, voire de nouveaux droits.

 


[1] LOI n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte

[2] Circulaire du 26 juin 2024 relative à la procédure de signalement des alertes émises par les agents publics et aux garanties et protections qui leur sont accordées dans la fonction publique dans le cadre des articles 6 à 15 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique modifiée par la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte

[3] CSA pour fonction publique d’État, CSE pour fonction publique Hospitalière, et CST pour la fonction publique territoriale

[4] https://www.defenseurdesdroits.fr

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