Recours aux CDD : le rôle du CSE

Pour compléter notre article sur le CDD, nous souhaitions faire un focus sur le rôle du CSE. Bien que le recours aux CDD soit intrinsèque à certains secteurs d'activité, il est important de porter une attention particulière à cette population qui est souvent précaire et plus sujette aux accidents du travail.

Article extrait de Décodage n°32 | Février 2024


 

Le CSE doit être consulté lors de certains cas de recours au CDD

Il existe une consultation ponctuelle du CSE spécifique à certains cas de recours au CDD. Le CSE doit être préalablement consulté :

  • Lors du remplacement d'un salarié en cas de départ définitif du salarié avant la suppression de son poste de travail (art. L. 1242-2 1°) du Code du travail). À ce titre, le CSE doit également être consulté sur la réorganisation envisagée et les mesures à l'origine de la suppression de poste (art. L. 2312-8 du Code du travail) ;
  • Lorsque survient dans l'entreprise une commande exceptionnelle à l'exportation dont l'importance nécessite la mise en œuvre de moyens quantitativement et qualitativement plus exorbitants que ceux qu'elle utilise ordinairement (art. L. 1242-8-1 3° et L. 1242-5 2° du Code du travail).


La question du recours aux CDD fait partie de la consultation récurrente sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi

En l'absence d'accord sur le contenu des consultations récurrentes, la consultation sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi porte notamment sur l'évolution de l'emploi et le recours aux CDD (art. L. 2312-26 du Code du travail). En effet, dans le cadre de cette consultation, l'employeur doit mettre à disposition du CSE, dans la BDESE, les informations sur ce sujet.

Par ailleurs, dans les entreprises de moins de 300 salariés, l'employeur doit mettre à disposition du CSE les informations suivantes (art. R. 2312-8 et R. 2312-19 du Code du travail) :

  • le nombre de salariés titulaires d'un CDD ;
  • les motifs ayant conduit l'entreprise à recourir aux CDD ;
  • les mesures contenues dans le programme annuel de prévention des risques professionnels et d'amélioration des conditions de travail (PAPRIPACT) telles que l'information adaptée et la formation renforcée à la sécurité dues aux salariés titulaires d'un CDD affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité.

Dans les entreprises d'au moins trois cents salariés, l'employeur doit mettre à disposition du CSE les informations suivantes (art. R. 2312-9 et R. 2312-20 du Code du travail) :

  • le nombre de salariés titulaires d'un CDD au 31/12 ;
  • le nombre d'embauches par CDD (dont nombre de contrats de travailleurs saisonniers) ;
  • le nombre de fins de CDD ;
  • les mesures contenues dans le programme annuel de prévention des risques professionnels et d'amélioration des conditions de travail (PAPRIPACT) telles que l'information adaptée et la formation renforcée à la sécurité dues aux salariés titulaires d'un CDD affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité ;
  • s'agissant de la situation comparée des femmes et des hommes dans l'entreprise :
    • répartition par catégorie professionnelle selon les différents contrats de travail (CDI ou CDD),
    • répartition des embauches par catégorie professionnelle et type de contrat de travail,
    • répartition des départs comme la fin de CDD par catégorie professionnelle.

 

Dans le cadre de la consultation sur la politique sociale, le CSE peut demander à l'employeur le taux de contribution d'assurance chômage de l'entreprise afin de connaître la modulation applicable à ce taux.

Le bonus-malus est un dispositif consistant à moduler à la hausse ou à la baisse le taux de  contribution d'assurance chômage à la charge des employeurs, en fonction du nombre de fins de contrat de travail ou de missions d'intérim donnant lieu à inscription à France Travail (ex Pôle emploi) de l'ancien salarié ou intérimaire.

L'objectif de ce dispositif est d'inciter les entreprises à allonger la durée des contrats de travail et à éviter un recours excessif aux contrats courts, qui sont généralement des CDD ou des contrats de mission.

Le bonus-malus s'applique aux entreprises de 11 salariés et plus relevant des secteurs d'activités suivants :

  • fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac ;
  • transports et entreposage ;
  • hébergement et restauration ;
  • travail du bois, industries du papier et imprimerie ;
  • fabrication de produits en caoutchouc et en plastique ainsi que d'autres produits minéraux non métalliques ;
  • production et distribution d'eau ; assainissement, gestion des déchets et dépollution ;autres activités spécialisées, scientifiques et techniques.

 


Le CSE est informé trimestriellement sur l'évolution des effectifs

Dans les entreprises d'au moins trois cents salariés, les informations trimestrielles dues au CSE[1] retracent mois par mois, l'évolution des effectifs et de la qualification des salariés par sexe en faisant, notamment, apparaître le nombre de salariés par type de contrat de travail tel que le nombre de salariés en CDD (art. R. 2312-21 du Code du travail). L'employeur doit présenter au comité les motifs l'ayant, notamment, conduit à recourir aux salariés en CDD. En outre, l'employeur communique au comité le nombre des journées de travail accomplies, au cours de chacun des trois derniers mois, par les salariés titulaires d'un CDD.

Ces informations permettent au CSE de contrôler les recours aux contrats précaires en comparaison avec le nombre de CDI.

Le CSE a donc un droit de regard important afin de limiter le recours abusif aux CDD dits contrats précaires.


Le CSE dispose d'un droit d'alerte sociale en cas de recours trop important ou abusif de CDD

Le CSE dispose d'un droit d'alerte sociale en cas d'accroissement important du nombre de CDD. Lorsque le nombre des salariés titulaires d'un CDD connaît un accroissement important par rapport à la situation existant lors de la dernière réunion du CSE ayant abordé ce sujet, l'examen de cette question est inscrit de plein droit à l'ordre du jour de la prochaine réunion ordinaire du comité si la majorité des membres du comité le demande (art. L. 2312-70 du Code du travail).

Lors de cette réunion ordinaire, l'employeur communique au comité le nombre de salariés titulaires d'un CDD, les motifs l'ayant amené à y recourir ainsi que le nombre des journées de travail accomplies par les intéressés depuis la dernière communication faite à ce sujet.

Ce droit d'alerte sociale lui permet également de saisir l'Inspection du travail. Lorsque le CSE a connaissance de faits susceptibles de caractériser un recours abusif aux CDD, ou lorsqu'il constate un accroissement important du nombre de salariés titulaires de CDD, il peut saisir l'agent de contrôle de l'inspection du travail. Ce dernier adresse à l'employeur le rapport de ses constatations (art. L. 2312-71 du Code du travail). L'employeur communique ce rapport au comité en même temps que sa réponse motivée aux constatations de l'agent de contrôle de l'inspection du travail. Dans sa réponse, l'employeur précise, en tant que de besoin, les moyens qu'il met en œuvre dans le cadre d'un plan de résorption de la précarité destiné à limiter le recours à ces formes de contrats de travail.

 

À travers son droit d'alerte sociale, le CSE a ainsi la possibilité de contrôler que l'employeur ne détourne pas le recours aux CDD. Ce type de contrat n'a pas pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. Or, un recours abusif ou trop important aux CDD dénote le contraire. En agissant ainsi, l'employeur ne recourt pas aux CDD en raison de besoins ponctuels et temporaires, ce qui contribue à la précarisation de certains emplois.

 

Dans notre prochain numéro,
nous aborderons la question
du recours à l'intérim

 


[1] Article L. 2312-69 du Code du travail

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